Le parlement français votera ce mercredi 27 mai 2020 sur le projet d’application de traçage numérique StopCovid, présenté par le Gouvernement dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19. L’objet de cette application sera de tracer les contacts des utilisateurs avec des personnes testées positives à la COVID-19, afin d’aider les autorités à mieux identifier les personnes à risque de contamination, les tester, les isoler du reste de la population et, quand c’est possible, les traiter.
Malgré l’avis favorable mais prudent de la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) sur l’utilisation de cet outil, dont le Gouvernement souhaite qu’il soit disponible au téléchargement dès “ce weekend”, Internet Sans Frontieres demeure inquiète.
Incertitude sur le temps
Parmi les sujets de notre préoccupation, il y a le temps : selon le Gouvernement, StopCovid a vocation à disparaitre six mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire. Mais la grande incertitude qui règne sur la fin de pandémie laisse craindre une persistance de ce dispositif bien au delà de janvier 2021, l’état d’urgence ayant été prolongé jusqu’en juillet 2020.
Analyse d’impact sur la protection des données
En outre, selon le Gouvernement, les données feront l’objet d’une “pseudonymisation”, pour limiter la possibilité d’attribuer les données, ici des informations sur l’état de santé, à une personne physique identifiée. Sans pour autant l’empêcher : de nombreux experts ont évoqué les risques de “ré-identification”, notamment par des acteurs mal intentionnés. A cet égard, il semble que la recommandation faite par la CNIL de procéder à “une analyse d’impact sur la protection des données (AIPD) (…) avant toute mise en œuvre d’un tel dispositif” ne pourra être prise en compte : l’application devrait être disponible ce week-end, selon le souhait du Gouvernement. Une étude indépendante d’impact sur les risques de StopCovid pour la vie privée et d’autre droits fondamentaux aurait renforcé la confiance des citoyens dans un processus transparent.
Un dispositif efficace ?
La fiabilité et l’efficacité des applications de traçage de contacts, en comparaison avec les méthodes traditionnelles, sont généralement remise en question dans les débats sur l’usage des technologies dans le cadre de la lutte contre la COVID-19. Des experts interrogent en particulier la manière dont ces applications prennent en compte les cas où une personne a été en contact avec une personne testée positive, mais portait un masque et des gants – cas de faux positifs ; et les cas où des personnes non déclarées malades n’ont pas pris les mesures d’hygiène adéquats et ont été en contact avec des surfaces contaminées – cas de faux négatifs.
Enfin, l’utilisation de la technologie Bluetooth est présentée comme moins intrusive pour la vie privée que le recours aux données de localisation. Il semble néanmoins important de noter que ce dispositif rappelle celui des Bluetooth Beacons, régulièrement indexés par les défenseurs de la vie privée pour leur usage dans le monde de la publicité ciblée.
Internet Sans Frontières reste sur la réserve face à ce dispositif. En l’état, nous ne recommandons donc pas l’adoption par les parlementaires du projet d’application StopCovid.