Internet Sans Frontières encourage l’intérêt du gouvernement du Président Kenyatta, dont le parti Jubilee a été cité parmi les clients de la société Cambridge Analytica, à agir contre la diffusion de la désinformation sur Internet. Cependant, nous doutons que l’inflation législative actuelle résoudra le problème.
De nombreux exemples dans le monde démontrent que les lois anti fake news peuvent être et sont utilisées pour censurer, volontairement ou non. La loi NetzDG en vigueur en Allemagne depuis janvier 2018 est critiquée notamment parce qu’elle place la responsabilité de supprimer les contenus problématique essentiellement sur les épaules des plateformes de contenus, et leur algorithmes opaques. En Malaisie, un homme a été emprisonné de manière disproportionnée pour avoir dit dans une vidéo postée sur Youtube que la police Malaise avait mis trop longtemps à intervenir pour aider son ami, militant du Hamas, qui venait d’être la cible de tirs mortels. Il s’est plus tard excusé auprès du juge, arguant d’un moment de colère. A l’opposé de ces pays, la cour suprême de Gambie vient de déclarer inconstitutionnelles les dispositions relatives à la diffusion de fausses nouvelles sur Internet : après 20 ans de dictature, ce pays aligne son corpus juridique sur les standards démocratiques et internationaux.
De plus, le scandale de Cambridge Analytica a démontré que l’aspect psychologique est essentiel: un internaute est plus susceptible de partager du contenu qui parle à sa psychologie. La protection de la vie privée et des données personnelles des citoyens devrait figurer parmi les priorités dans la lutte contre les fausses nouvelles et la manipulation sur Internet. Dans une étude récente sur les droits numériques en Afrique subsaharienne, Internet Sans Frontières rappelle que le Kenya n’a toujours pas de loi sur la protection des données personnelles.
“En 2016, l’ONU a déclaré que les droits de l’homme en ligne et hors ligne ont la même valeur. En adoptant des lois visant spécifiquement à lutter contre la désinformation sur Internet, des pays comme le Kenya contredisent la résolution A / HRC / 32 / L.20 du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. La plupart des pays ont déjà les outils juridiques pour lutter contre les fausses nouvelles hors ligne et en ligne, cette inflation législative ajoute plus de problèmes qu’elle n’en résout. Les solutions aux fausses nouvelles sont ailleurs ” a déclaré Julie Owono, directrice exécutive d’Internet Sans Frontières
Internet Sans Frontières exhorte le Kenya à explorer d’autres solutions au problème de la désinformation, notamment l’éducation aux médias et le soutien aux initiatives de fact checking, et à adopter d’urgence une loi sur la protection des données personnelles.